Maître Manon Dantin, avocat
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Quels sont les critères de poursuite d'un crime en droit pénal international ?

Le 16 janvier 2025
Quels sont les critères de poursuite d'un crime en droit pénal international ?
Découvrez les conditions de poursuite des crimes en droit pénal international. Génocide, crimes de guerre : quand la CPI peut-elle intervenir ?

Savez-vous que certains crimes sont si graves qu'ils relèvent de la compétence d'une juridiction internationale ? La Cour Pénale Internationale (CPI), créée en 2002, a pour mission de poursuivre les auteurs des crimes les plus graves touchant la communauté internationale. Mais quels sont précisément les critères pour qu'un crime soit poursuivi devant cette instance ? Maître Manon Dantin, avocate expérimentée à Marseille, vous éclaire sur les conditions et critères de poursuite d'un crime en droit pénal international.

Génocide, crimes de guerre, crimes contre l'humanité : les crimes les plus graves

La CPI est compétente pour juger quatre catégories de crimes, clairement définis dans le Statut de Rome, le traité fondateur de la Cour. Il s'agit des crimes les plus graves qui touchent l'ensemble de la communauté internationale :

  • Le génocide
  • Les crimes de guerre
  • Les crimes contre l'humanité
  • Le crime d'agression

Pour être poursuivis devant la CPI, ces crimes doivent avoir été commis après le 1er juillet 2002, date d'entrée en vigueur du Statut de Rome. Avant cette date, seuls les tribunaux nationaux ou des tribunaux pénaux internationaux ad hoc, comme ceux créés pour l'ex-Yougoslavie et le Rwanda, pouvaient juger ces crimes.

Bon à savoir : Le Statut de Rome définit précisément les éléments constitutifs de chaque crime relevant de la compétence de la CPI. Par exemple, pour le crime de génocide, il faut prouver l'intention spécifique de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux.

Chefs d'État, ministres, militaires : tous peuvent être poursuivis

Une spécificité importante de la CPI est qu'elle peut poursuivre tout individu présumé responsable d'un des crimes relevant de sa compétence, quelles que soient ses fonctions officielles. Contrairement aux juridictions nationales, il n'existe pas d'immunité devant la CPI, même pour les chefs d'État, les ministres ou les parlementaires.

La Cour se concentre sur les personnes portant la plus lourde responsabilité dans la perpétration des crimes, au regard des preuves recueillies. Il peut s'agir de responsables politiques, de chefs militaires ou de dirigeants de groupes armés. En revanche, la CPI ne peut pas poursuivre des États, des entreprises ou des organisations en tant que tels.

Exemple illustratif : En 2019, l'ex-président soudanais Omar Al-Bachir a fait l'objet d'un mandat d'arrêt de la CPI pour crimes de guerre, crimes contre l'humanité et génocide présumés au Darfour. Bien qu'il fût chef d'État au moment des faits, son immunité ne pouvait pas le protéger des poursuites devant la CPI.

Un crime commis sur le territoire ou par un ressortissant d'un État partie

Pour que la CPI soit compétente, il faut que le crime ait été commis sur le territoire d'un État partie au Statut de Rome, c'est-à-dire un des 123 États ayant ratifié le traité. La Cour peut aussi être compétente si l'auteur présumé est un ressortissant d'un État partie, quel que soit le lieu où le crime a été perpétré.

Il existe une exception : un État qui n'est pas partie au Statut de Rome peut faire une déclaration ad hoc pour reconnaître la compétence de la CPI sur une situation particulière. C'est ce qu'a fait l'Ukraine en 2014, permettant à la Cour d'enquêter sur les crimes présumés commis sur son territoire depuis novembre 2013.

A noter : Certains États puissants comme les États-Unis, la Russie et Israël n'ont pas ratifié le Statut de Rome, ce qui limite la compétence de la CPI sur les crimes commis sur leur territoire ou par leurs ressortissants.

Un rôle complémentaire des juridictions nationales

Il est important de souligner que la CPI n'a pas vocation à se substituer aux tribunaux nationaux. Son rôle est complémentaire : elle n'intervient qu'en dernier recours, lorsque l'État compétent n'a pas la volonté ou la capacité de mener véritablement à bien l'enquête et les poursuites.

En effet, ce sont d'abord aux États qu'il incombe de poursuivre les crimes internationaux. La CPI ne peut pas juger tous les crimes relevant de sa compétence à travers le monde, ses ressources étant limitées. C'est pourquoi il est essentiel que les États adaptent leur législation pour pouvoir juger ces crimes au niveau national.

Trois manières de saisir la Cour Pénale Internationale

Une affaire peut être portée devant la CPI de trois manières différentes :

  • Un État partie peut renvoyer une situation au Procureur de la CPI
  • Le Conseil de sécurité de l'ONU peut déférer une situation à la Cour, comme il l'a fait pour le Darfour et la Libye
  • Le Procureur peut ouvrir une enquête de sa propre initiative, avec l'autorisation des juges, sur la base d'informations reçues de diverses sources

Dans tous les cas, c'est au Procureur qu'il revient de déterminer s'il existe une base raisonnable pour ouvrir une enquête, en examinant la gravité des crimes, les intérêts des victimes et la complémentarité avec les procédures nationales.

Bon à savoir : Les victimes de crimes internationaux peuvent bénéficier de mesures de protection et d'assistance de la part de la CPI. Elles peuvent également participer aux procédures et demander réparation. En 20 ans, plus de 10 000 victimes ont participé aux procédures devant la CPI.

En résumé, voici les informations clés à retenir sur les conditions et critères de poursuite d'un crime devant la CPI :

  • Les crimes poursuivis sont le génocide, les crimes de guerre, les crimes contre l'humanité et le crime d'agression
  • Tout individu peut être poursuivi, quelles que soient ses fonctions officielles
  • Le crime doit avoir été commis sur le territoire ou par un ressortissant d'un État partie au Statut de Rome
  • La CPI est complémentaire des juridictions nationales et n'intervient qu'en dernier recours
  • La Cour peut être saisie par un État partie, le Conseil de sécurité de l'ONU ou le Procureur

Si vous souhaitez en savoir plus sur les conditions de poursuite des crimes internationaux ou sur tout autre sujet de droit pénal, n'hésitez pas à solliciter l'expérience de Maître Manon Dantin. Avocate engagée et à l'écoute, exerçant à Marseille, elle saura vous conseiller et vous guider avec compétence et détermination.